[Vidéo] Du CE-CHSCT au CSE : quelle continuité pour les expertises déjà lancées et pour le patrimoine ?

[Vidéo] Du CE-CHSCT au CSE : quelle continuité pour les expertises déjà lancées et pour le patrimoine ?

19.12.2018

Représentants du personnel

Lors d'une matinée consacrée au CSE, Laurent Le Dortz, responsable juridique de Syndex, et Béatrice Bursztein, avocate de LBBa, ont livré leurs recommandations aux représentants du personnel pour tenter de négocier au mieux le comité social et économique. Ils ont notamment abordé la question de la continuité des expertises en cours et de la transmission du patrimoine immobilier du CE au CSE.

 

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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Partager les premiers retours d'expériences sur la négociation et la mise en place des CSE et livrer quelques conseils : c'était l'enjeu de la matinée proposée par le cabinet d'expertise Syndex aux représentants du personnel, vendredi 14 décembre à Paris (lire ici notre article et voir la vidéo sur la matinée de Sextant).

L'appréciation des accords déjà conclus dans les entreprises, qui aboutissent souvent à une centralisation du dialogue social et à une baisse des moyens pour la représentation du personnel, conduit Laurent Le Dortz, responsable juridique de Syndex, et Béatrice Bursztein, avocate au sein du cabinet LBBa, à recommander aux représentants du personnel de se préparer très en amont pour cette négociation en réalisant un diagnostic préalable et en tentant de trouver une position commune entre élus de différents établissements et entre organisations syndicales.

La définition du périmètre détermine le moyen des futurs représentants du personnel

 

"Il y a toutes sortes de pièges tant tout peut être négocié. Par exemple, si vous fixez un nombre de réunions par an sans évoquer la possibilité de réunions exceptionnelles, vous ne serez pas certains de pouvoir en tenir !" met en garde Laurent Le Dortz. Il n'est pas évident non plus, préviennent-ils, d'amener l'entreprise à octroyer un bonus quant au nombre d'élus et leurs heures de délégation, la solution de repli consistant à négocier des représentants de proximité pour maintenir un maillage suffisant. Mais la définition préalable du périmètre et donc du nombre des établissements distincts est déterminante. Pour en convaincre les élus, le responsable juridique de Syndex a pris cet exemple fictif : "Une entreprise de 1 200 salariés qui était organisée en 4 établissements différents peut choisir de passer en un CSE unique ou bien de conserver 4 CSE correspondants aux anciens CE. Dans le cas d'un CSE unique, il n'y aura que 17 titulaires, pour 408 heures de délégation. Dans le cas de 4 CSE, il y aura 44 titulaires pour 968 heures".

Attention aussi aux heures qu'il est possible de consacrer pour le travail en commission. En dehors de la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT), le temps passé en commission est limité à 30 heures en-deçà de 1 000 salariés et 60 heures au-delà. "Pensez à négocier à la hausse cette enveloppe globale, qui n'était auparavant pas fixée dans le code du travail", conseille Béatrice Bursztein. Autre recommandation : prévoir que la commission économique, obligatoire à partir de 1 000 salariés, sera présidée non par l'employeur, comme le prévoit par défaut la disposition supplétive, mais par un représentant du personnel. A des élus déjà en CSE qui se voient refuser toute mutualisation des heures par leur direction, l'avocate a répondu : "Non, la mutualisation figure dans la loi. Même si ce n'est pas mentionné dans l'accord du CSE, c'est une disposition qui s'impose à l'employeur". 

L'expertise déjà lancée avant le passage au CSE se poursuit après. Mais mieux vaut l'acter avant et après les élections

 

Les deux spécialistes ont également été interrogés au sujet des expertises, l'occasion pour nous de leur demander des précisions sur la question récemment posée par un abonné : un CE possédant un patrimoine immobilier qui passe au CSE doit-il acter ce changement devant le notaire ? La réponse de l'avocate (voir ci-dessus dans l'interview vidéo) apporte un bémol à la première réponse que nous avions apportée. Concernant les expertises qui seraient déjà lancées par un CHSCT (par exemple dans le cadre d'un risque grave ou d'un projet important) ou par un CE (dans le cadre d'un droit d'alerte) alors que l'entreprise passe en comité social et économique, que se passe-t-il ? La continuité l'emporte entre les deux instances, mais le juriste et l'avocate recommandent aux instances CE-CSHCT d'acter lors de la dernière réunion de l'instance (CE ou CHSCT) que l'expertise sera continuée par le CSE, et pareillement, lors de la première réunion du CSE, d'adopter une délibération prévoyant la poursuite de l'expertise.

Prévoyez des consultations locales pour la politique sociale

 

Les élus ont bien sûr intérêt à anticiper les questions budgétaires, ont encore alerté l'avocate et le responsable juridique : le CSE devra prendre en charge les dépenses de sa commission CSSCT, alors que l'employeur payait celles du CHSCT, et le CSE central doit disposer d'un budget autonome. De façon générale, le spécialiste de Syndex et l'avocate ont livré plusieurs conseils de prudence à avoir en tête lors de la négociation sur le CSE :

  • maintenir la fréquence annuelle des consultations;
  • négocier un calendrier social pour caler les différentes consultations et s'organiser;
  • prévoir des consultations locales au sujet de la politique sociale (d'autant que l'instance centrale du CSE risque d'accaparer les questions économiques et stratégiques);
  • prévoir un délai minimum de 3 mois pour les avis lors des grandes consultations avec remise d'une expertise;
  • faire démarrer les consultations par une réunion du CSE.

Ce dernier point n'est pas anecdotique. "Légalement, l'information-consultation part à partir du moment où l'employeur met l'information à votre disposition. Mais s'il n'organise pas de réunion pour dire que la base de données économiques et sociales a été actualisée, vous ne pourrez pas réagir tout de suite en cas de problème ou d'information insuffisante et vous allez perdre un temps précieux", alerte Laurent Le Dortz.

Enfin, en réponse à la question d'un élu sur l'opportunité d'opter pour le conseil d'entreprise (le CSE augmenté du pouvoir de négocier et disposant d'un avis conforme sur la formation), l'avocate Béatrice Bursztein s'est montrée plus que sceptique sur cette instance : "L'avis conforme est à mes yeux illusoire. Si le conseil d'entreprise revendique la multiplication par deux du budget de formation, que va-t-il se passer ? Le conseil d'administration va-t-il s'aligner sur la position du conseil d'entreprise ? Et si ce n'est pas le cas, le conseil pourra-t-il vraiment obtenir d'un juge des dommages et intérêts à la hauteur de l'effort de formation réclamée à l'entreprise ?"

Bernard Domergue
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